jeudi 31 juillet 2008

Sur la route d'Iòna

Kenji la réveilla quelques heures plus tard. Ils prirent un repas frugal et se remirent en route. Le jour se levait tout juste, et de lourds nuages obscurcissaient le ciel. Une brume épaisse s'élevait des rizières, rendant les alentours plutôt inquiétants. La femme leur fit don de 2 chevaux. En fait, il semblait plutôt que les chevaux avaient été amenés ici juste pour eux. Sheena fût heureuse de pouvoir sentir à nouveau cette sensation merveilleuse que procure le chevauchement. Sa monture avait à la crinière claire avait une robe sombre. Ils se mirent en route vers l'est. Ils durent traverser les rizières. La route commença en silence. Seuls les clapotis des sabots s'enfonçant dans l'eau venaient perturber la scène. Les oiseaux chantaient dans un joyeux concert matinal. Sheena se lançait porter par son cheval, qui suivait docilement celui de Kenji. Peu à peu, les nuages laissaient place à un soleil éclatant. Pour l'heure, la fraîcheur de la nuit leur permettaient d'avancer sans contrainte, mais bientôt, la chaleur deviendrait étouffante. Peut être Kenji leur laisserait-il faire une pause quand le soleil serait à son zénith. Sheena se laissait nonchalamment bercée par le rythme du cheval, tout en ne perdant aucune miette du paysage environnant. Elle avait toujours apprécié voir le lever du jour, jamais elle ne se lassait de ce spectacle grandiose. Les reflets du soleil sur la rosée matinale, les couleurs pastels que prenait le ciel, les chevreuils qui profitaient du calme pour chercher des bourgeons appétissants...Cette tranquillité apaisante lui permettait de clarifier ses pensées, et lui procurait un bonheur indescriptible.
Une heure après leur départ, Kenji se décida enfin à parler :

- Je vous emmène au sein de ma Cité, Iòna, selon les dernières volontés d'Hapousenb.

- Iòna.... Ainsi vous connaissiez Hapousenb ? Que vous a t'il demandé, pourquoi a t'il voulu que je vous suive ?

- Oui, Hapousenb était mon élève, il y a de cela fort longtemps. C'est moi qui lui ai appris l'art des Shurikens. Il a grandi à Iòna, et en est parti pour des raisons qui me restent encore obscures à ce jour... La fuite de responsabilités trop lourdes à porter sans doute...Toujours est-il que je me suis employé depuis son départ à le retrouver.

- L'art des Shurikens... Sheena se remémora la mort de son grand père. Depuis ce jour, par respect pour celle qu'il considérait comme sa fille, Hapousenb avait cessé de se servir de cette arme, du moins en sa présence. Cette petite fille, il l'avait prise son aile, considérant son intervention comme un signe des Dieux, et il l'avait emmenée avec lui pour purger chaque jour sa peine, en lui rappelant tout le mal qui avait fait subir à de nombreux innocents.

- Oui exactement. J'ai été son professeur, et je dois avouer que ce ne fût pas une mince affaire. Hapousenb était un esprit libre, à la recherche d'une quête supérieure. Je ne sais pas si sa vie a été conforme à ses souhaits... Toujours est-il que j'ai retrouvé sa trace il y a peu de temps. Il m'a annoncé son projet, je lui ai rétorqué qu'il était fou. Il ne l'a pas mal pris, au fond, il savait que j'avais raison. Mais c'est alors qu'il m'a parlé de vous. Il m'a avoué son désir de vous adopter légalement, et je l'ai aidé à faire les quelques démarches nécessaires pour y parvenir. Si vous y consentez, bien sûr, à notre arrivée, vous devrez à votre tour m'accompagner pour remplir quelques documents.

- Je vois... Sheena sombra dans la mélancolie un instant. Il ne m'a jamais fait part de son souhait. Je vous avoue ne jamais avoir réfléchi à cette possibilité, et je ne me rends pas bien compte des conséquences d'un tel acte. Voyez-vous, j'ai vécu jusqu'aujourd'hui sans aucune attache. Bien sûr, j'ai vécu toutes ces années en compagnie de mes frères de misère, mais après tout, rien ne me reliait vraiment à eux, et j'étais libre de partir à ma guise...

- Vous aurez tout le temps nécessaire pour penser à cela une fois arrivée. Vous savez, il vous portait dans son cœur. Je ne doute pas un instant que ses dernières pensées aient été pour vous. Il m'a imploré de vous prendre à mon tour en charge. Vous savez, je ne suis plus de la première jeunesse. Je suis humain, vous êtes elfes. Le temps n'a pas d'emprise sur vous, alors que chaque jour qui passe me vieillit un peu plus. Je n'ai plus d'élèves depuis bien longtemps à présent. Mais par respect pour celui qui fût mon meilleur disciple, j'ai accepté sa requête. Je vous apprendrai l'art des Shurikens.

Elle garda le silence un instant suite à ces révélations. Ainsi, son destin la conduisait à tout apprendre de l'arme qui était responsable de l'exécution de son grand-père.... Elle ne savait plus trop quoi penser de cela, et répondit à Kenji :

- Mon maître... Ainsi donc, je devrais apprendre de nouveau à ôter des vies ? Quelle étrange destinée...

- Sheena, vous devez savoir qu'il n'incombe qu'à vous d'enlever ou non des vies. L'arme n'est que le moyen qui sert votre pensée. Elle ne prend vie que par vos mains, c'est vous qui décidez ou non de mettre en pratique le cheminement de votre pensée.

Kenji retomba dans le silence. Sheena ne répondit pas à ces dernières paroles. Que pouvait-elle dire, sinon que l'homme avait raison... Elle leva les yeux vers le ciel azuré, et médita longtemps sur ce qui lui avait dit son maître, puisqu'il convenait à présent de l'appeler ainsi.

Vers midi, la chaleur commença a devenir insupportable. Kenji avisa un petit étang, abrité par divers arbres. Ils descendirent de leur monture, et elle fût chargé de faire boire les chevaux. A son retour, elle attacha les brides autour d'un hêtre, et rejoignit Kenji. Il avait profité de son absence pour allumer un feu, sur lequel il mit à bouillir une petite casserole dans laquelle il plongea quelques légumes donnés par le femme avant leur départ, ainsi que des petits champignons. Après ce repas, ils décidèrent de prendre un peu de repos. Kenji alla s'installer au pied d'un arbre pour dormi, alors que Sheena se rapprocha de l'étang. Elle s'assit au bord de l'eau et resta là à observer les éléments qui l'entouraient. De temps à autre, un poisson venait gober un insecte sur la surface de l'eau, provocant une auréole à la surface de l'eau. De nombreuses grenouilles croassaient autour d'elle, et elle en aperçut quelques unes nageant à la surface de l'eau. Des nénuphars blancs déployaient leurs pétales sur le bord de l'eau, alors que des roseaux étaient bercés doucement par une petite bris qui venait de se lever. Un héron se tenait à l'autre bout de l'étang. Tout comme elle, il attendait. Il attendait le bon moment pour plonger dans l'eau en quête du poisson qui lui servirait de met pour son repas. Et elle, qu'attendait-elle ainsi ? Elle finit par s'assoupir, emporter par le manque de sommeil des 2 jours précédents.

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