jeudi 31 juillet 2008

Une lueur dans la nuit


Une nouvelle fois, elle eût l'impression de se retrouver seule au monde. Elle pleura longtemps, en silence. Elle était seule, oui, et son cœur ne voulait plus continuer à vivre ainsi ; mais son instinct lui conseillait de continuer la lutte contre cette vie cruelle. Elle resta donc aux aguets, pour ne pas être surprise. Un silence profond l'enveloppait, brisé de temps à autre par le souffle d'un cheval. Elle devait se battre puisqu'elle avait survécu à ses amis... Dehors, la pluie commença à tomber, un peu tout d'abord, puis de plus en plus fort. Les gouttes d'eau martelaient le bois de l'écurie d'un bruit sourd. Elle commença à avoir froid, à rester dans cette position inconfortable. La nuit passa ainsi pour elle, à scruter la pénombre.
Au petit matin, alors qu'elle s'apprêtait à s'endormir après cette nuit épuisante, elle entendit des pas. Elle se concentra, et déduisit que 2 hommes étaient entrés par ici. Elle retint son souffle. Puis elle aperçut leurs silhouettes. Elle ne s'était pas trompée, 2 hommes se tenaient bien en bas. Les chevaux se mirent à hennir doucement à l'arrivée des individus. Il devait s'agir de palefreniers du roi qui se tenaient là. Ils opérèrent les 1ers soins aux animaux silencieusement. Elles les observa, attentive au moindre de leur geste, se tenant prête à fuir s'il le fallait. Elle constata que l'un des 2 devait être bien âgé, à en juger par sa démarche. Le plus jeune finit par s'accorder un instant de pause, et se dirigea alors vers la porte. Il jeta un coup d'œil vers la place, et un rictus de triomphe passa sur ses lèvres : « Chiens ! dit-il, voilà ce qui arrive quand on s'en prend à notre roi ! » Sheena se retint d'aller lui planter une lame dans la gorge, et se concentra sur le vieillard qui continuait sa besogne. Il avait saisi une fourche et se dirigeait vers la paille dans laquelle elle se tenait. Il planta son outil dans une botte et Sheena s'éloigna bien vite. La fourche lui avait égratigné la cuisse. Mais peu lui importait. Elle regarda le vieillard qui levait à présent les yeux vers elle. Il ne pouvait la voir d'où il se tenait, mais elle savait que son mouvement brusque pouvait à présent lui coûter la vie. Le vieil homme regardait toujours. Elle avait la sensation qu'il la voyait, que son regard perçant lui brûlait le corps tout entier. « S'en est fini » pensa t'elle. Pourtant, contre toute attente, quand l'autre homme revint, le vieillard se remit au travail et lança à son équipier : « Occupes toi de les panser. Je me charge de la paille ». En entendant ces mots, plus aucun doute ne subsistait pour elle. Il l'avait vu, du moins ressentait sa présence. Mais il l'avait épargné, en tout cas pour l'instant.
Plusieurs fois dans la journée, elle failli être découverte. Elle attendait que la nuit ai revêtue sa robe sombre pour tenter de s'échapper du royaume. Elle changea de cachette à plusieurs reprises sans jamais se faire repérer. Voilà plus d'une journée qu'elle n'avait pas mangé, et son ventre commençait à crier famine.... La nuit arriva enfin, et les allers-venues cessèrent peu à peu. Elle attendit encore un peu, pour être sûre de rencontrer le moins de personnes possible. Elle s'apprêtait à partir quand elle perçut des bruits de pas étouffés. Quelqu'un passa lentement la grande porte, et se dirigea vers la paille dans laquelle elle se tenait la nuit dernière. A sa démarche, elle reconnu le vieillard. Alors, il l'avait bien vu. Elle ne savait que faire, que lui voulait-il ? Il se mit à chuchoter : « Je sais que vous êtes là, sortez que je vous vois. Que faîtes-vous donc caché ainsi. Allez, venez, je ne vous ferai aucun mal ! » Sheena profita qu'il était concentré sur ces paroles pour se rapprocher doucement, tout en restant à l'abri des stalles. L'homme continuait « «Je vous ai apporté de quoi manger. Allons, n'ayez crainte ! » Elle se tenait à présent derrière lui, sa dague longue à la main. Elle toussota , et l'homme se retourna. Ils se dévisagèrent un instant sans rien dire. Il lui semblait moins vieux qu'il n'y paraissait au 1er abord. Elle perçut un secret en lui, elle se rendit soudain compte avec effroi qu'elle avait sous estimé cet individu. Lui découvrit une elfe au corps svelte, trop maigre en fait, les cheveux blonds en bataille, où il aperçu ça et là des brindilles jaunes, les vêtements sales, le visage boueux, mais le regard vif et l'air déterminé. Ce vieillard jouait manifestement un rôle. Elle leva donc sa dague, prête à en user s'y besoin.
-« Que me voulez vous ?
- Tenez, prenez ça, dit-il en lui tendant une miche de pain. Il vit qu'elle hésitait.
- Qui me dit que vous ne l'avez pas empoisonnée ? répondit-elle d'un air méfiant. Et puis pourquoi me donneriez vous gracieusement à manger ?
- Ne crois-tu pas que j'aurai pu te tuer ce matin si je le voulais vraiment. Je n'aurai aucun intérêt à te supprimer à présent. Mange ! »
Elle accepta finalement cette nourriture providentielle. Elle mourrait de faim, et commença donc à manger sans attendre. L'homme lui laissa le temps de prendre quelques bouchées, et alla s'asseoir sur un baril. Puis il repris, jetant des regards nerveux vers l'extérieur :
- « Si on me savait en compagnie d'un des brigands qui sont venus hier soir, on me tuerai sur le champ. » Il leva les yeux vers elle et continua : « car tu faisais bien parti de ceux-là, n'est-ce pas ? » Devant le silence de Sheena, il poursuivit : « écoutes, je vais te proposer quelque chose. Je t'expliquerai plus en détail plus tard, nous ne devons pas rester ici plus longtemps. Viens, suis-moi ».
Il se leva, et se dirigea vers le fond de l'écurie, souleva le couvercle d'une caisse, et en sortit une cape sombre. Il la lança en direction de l'elfe. Elle l'attrapa, hésita, puis la mit autour de ses épaules et ajusta sa capuche, de sorte qu'il ne voyait plus ses yeux à présent.
- « Je vais vous suivre, rien ne me retiens plus en ce monde. Alors je ne crains pas plus à vos côté que seule dans cette pénombre. Je ne sais ce que vous voulez faire de moi, mais je suis prête à entendre votre proposition. Juste une chose, laissez-moi vous demander votre nom.
- Je me nomme Kenji. Muto Kenji. Allons à présent. »
Il sortit dans la nuit froide, et disparut quasiment de la vue de Sheena. Elle le suivit, sans aucune peur de se faire prendre. Elle ne risquait plus rien de toute façon.

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